Cloé : Bonjour tout le monde et bienvenue dans ce nouvel épisode de Parcours d'Indés, le podcast d'hauméa Magazine, un magazine 100% industrie musicale indépendante qui met en avant à la fois des artistes et des pros qui ont fait le choix de l'indépendance artistique pour leur carrière. Moi c'est Cloé, fondatrice d'hauméa. Aujourd'hui, je suis avec un artiste qui commence à se faire un nom sur la grande scène qui est la pop française, qui commence à tourner pas mal, qui a fait pas mal de passages en radio, pas mal de passages en télé, donc je suis avec Oete, que j'ai d'ailleurs vu au Crossroads à la condition publique. Bonjour Oete. Oete : Bonjour. Cloé : Merci beaucoup de prendre le temps de parler de ton parcours et de faire ce podcast avec nous. Donc avant tout, même si tu commences à être quand même pas mal connu, est-ce que tu pourrais te présenter en quelques mots pour ceux qui ne te connaîtraient pas encore ? Oete : Eh bien je m'appelle Oete et je fais ce que j'appelle de la musique pour danser sérieusement ou de la variété alternative, un projet en français qui a commencé à être pensé depuis deux ans et qui est vraiment en place depuis un an je dirais. Cloé : Et tu dis que tu fais de la variété alternative, ce que je trouve être un terme vraiment très parlant. Comment ? C'est venu comment ce style musical et cette signature musicale qui est très particulière à toi ? Oete : C'est un petit néologisme que j'ai voulu inventer parce qu'on aime bien, en tout cas on a besoin de nous mettre dans des cases pour être identifié, j'avais plutôt envie de créer la mienne et je m'identifie vachement à la variété parce que j'ai grandi avec la variété, j'aime ça très très profondément et à la fois je trouve qu'elle a une image très kitsch quand on pense à Claude François par exemple, un artiste comme ça et ce n'est pas le propos de ce que moi je propose et j'avais envie de pouvoir coller alternatives parce que je m'inspire aussi énormément de choses plus indépendantes comme de la new wave ou du rock et je me suis dit que ça ferait un bon mélange de mettre tout ça ensemble. Cloé : Aujourd'hui tu composes et tu écris ? Oete : Oui, je suis auteur-compositeur et je chante aussi du coup et voilà. Cloé : Et du coup toutes ces inspirations, à la fois kitsch comme tu dis et des choses un peu plus alternatives, comment ça t'influence vraiment au quotidien ou est-ce qu'il y a d'autres trucs ? Oete : Je dirais que c'est principalement ça qui m'influence, j'écoute très peu de musique non française entre guillemets, je m'intéresse vraiment à la scène musicale ce qui me permet de découvrir vraiment plein d'artistes émergents aussi, je pense la dernière que j'ai découverte c'est Ysé que j'adore et voilà donc je me focus beaucoup là-dessus. C'est vrai que je n'ai jamais eu beaucoup d'attrait pour la musique hors France donc je trouve que la barrière de la langue, même si je parle anglais je comprends très bien mais il y a toujours quelque chose qui est émotionnellement moins frappé je trouve. Cloé : Ce qui est marrant c'est que moi ça a été l'inverse pour moi, c'est que j'ai vachement grandi avec des musiques anglophones et la musique française je m'y suis mise vachement plus tard, ça fait peut-être 6-7 ans maintenant que je suis cette scène et j'en ai 25 donc comme quoi il y a eu un peu de chemin ! Mais la scène pop française c'est une scène qui est super diverse et ce que je trouve assez incroyable c'est qu'il y a énormément de manières de se développer sur cette scène, tu peux très bien te faire connaître uniquement sur les réseaux sociaux, tu peux te faire connaître via strictement tes disques et tes placements en playlist ou via le live parce que forcément c'est une scène qui quand même se développe beaucoup en live. Est-ce que toi tu as un recul aujourd'hui après ces deux ans de projet sur ce qui a fait que tu t'aies fait connaître entre guillemets de ta scène ? Oete : Je pense qu'il y a surtout un dispositif qui a un peu changé ma vie l'année dernière qui s'appelle les Inouïs du Printemps de Bourges, j'ai l'impression vraiment d'avoir commencé à émerger à partir de ce moment-là mais même moi en terme créatif, ça m'a vachement inspiré le fait d'être comme ça avec 30 autres personnes, 30 autres projets artistiques tous incroyables les uns que les autres et aussi les humains qu'on vient de rencontrer et puis à la fois la lumière un peu médiatique entre guillemets que ça apporte parce que quand vous jouez je ne sais plus la capacité du 22 à Bourges mais je pense que c'est 500 places à peu près, quand vous jouez devant 500 personnes qui sont tous des professionnels de la musique, des médias et des choses comme ça, ça offre une bonne porte d'entrée sur la scène musicale. Cloé : Et c'est bien de le dire parce que nous on a eu comme Julien Soulier du Fer un autre dispositif d'accompagnement sur le podcast deux épisodes avant le tient et nous avec On est partenaire du réseau Map, du réseau des musiques actuelles de Paris et notamment du tremplin GIVE ME FIVE, et ce qu'il faut savoir c'est que tous ces accompagnements enfin tous ces dispositifs en tout cas d'accompagnement, ces tremplin artistiques, c'est souvent devant des pros qu'on se représente parce que même si le printemps de Bourges c'est connu comme étant un festival qui attire aussi du public, les Inouïs en tout cas c'est vraiment quasiment que des pros. Est-ce que tu peux nous donner un petit peu ton retour d'expérience justement sur un petit peu ton point de vue à toi en interne ? Comment c'était justement cet accompagnement pendant un an avec les Inouïs ? Oete : C'était très intense à la fois. J'aimerais parler de la manière dont on ressent parce que c'est deux choses totalement différentes d'être devant un public d'auditeurs ou de personnes ou d'être devant un public de professionnels et je sais que personnellement j'ai vécu Bourges de manière très intense parce que pendant une semaine vous êtes dans une genre de classe verte on pourrait appeler ou une colo avec du coup tous ces autres projets et puis il y a un moment où vous devez monter sur scène. Moi c'était le vendredi donc c'était à la fin de la semaine et du coup c'est vrai que c'est comme si vous étiez en lion en cage et qu'à un moment on le lâchait et moi j'ai vraiment bouffé cette scène de Bourges. Ton projet vient en live en plus. Mais du coup c'est vrai que par la suite quand j'ai pu faire d'autres tremplin comme le MaMA par exemple qu'il y a une autre scène où on joue devant des pros. Il y a trois gros rangs des pros dans l'année. Les Inouïs, le MaMA, les Bars en Trans, les Transmusicales à Rennes. Mais du coup à chaque fois mon défi c'était ok on va essayer de faire encore mieux que ce qu'on a fait avant parce qu'il faut toujours aller convaincre. Cloé : Puis tu rencontres des pros différents. Il y a des gens qui vont te suivre évidemment entre le MaMA, les Inouïs ou les Transmusicales comme tu mentionnais. Mais tu dois sans cesse refaire tes preuves entre guillemets. Oete : C'est ça. Pour imaginer le truc j'avais un peu l'impression d'être à The Voice. C'est que tout le monde était retourné. Parce que c'est quand même des choses qui sont très dures. Le MaMA surtout par exemple on joue principalement dans des bars. Quand la salle de concert est collée avec un bar à côté que les gens parlent de programmation du travail et que vous vous devez donner votre concert. C'est quelque chose d'assez ostracisant et en même temps ça laisse pas le choix que d'y aller. Donc on aime bien ça. Cloé :é Surtout que le MaMA festival pour l'avoir fait déjà trois fois c'est une expérience en soi. Ça se passe en octobre tous les ans dans le quartier de Pigalle et de Montmartre. Et on enchaîne aussi bien entre le FGO Barbara la journée jusqu'à la Machine du Moulin rouge le soir. Et même pour les artistes c'est des formats de showcase c'est assez court pour soi. Et même j'imagine que pour toi c'est des formats, même au Crossroads c'était à peine 30 minutes. Oete : Le Crossroads c'était très court. Le MaMA je crois que c'était 30 minutes. Ouais c'est ça à peu près ouais. Cloé : Et donc toi ce qui est intéressant en l'occurrence c'est que tu t'es développé essentiellement sur une scène institutionnelle au départ. Donc les Inouïs, le MaMA etc etc. Comment est ce que tu as touché par contre un public plutôt ? Est ce que tu as un recul là dessus aujourd'hui ? Oete : Ouais je pense que la scène principalement, j'ai eu la chance d'avoir signé après les inuits, en réalité juste avant de commencer les inuits, juste avant de partir aux inuits à Bourges, j'ai signé en un tournoi qui s'appelle Auguri, qui est un des principaux producteurs de concert en France, notamment Angèle, Mathieu Chedid, plein d'autres. Dominique A, autant des indés que des personnes qui sont un peu les pôles position de la musique. Cloé : Et puis vachement sur la scène française aussi. Oete : Ouais ouais ils recherchent vraiment, puis même dans le rap, mais j'aime vraiment leur esthétique où c'est toujours le le texte qui prime et la capacité à être auteur. Et bon cette signature en tout cas, Heureux me sois, m'a permis de faire plein de concerts. Je pense notamment à des premières parties de Juliette Armanet, ou de Fishbach, de Feu Chatterton! aussi. C'est vrai que c'est des dates qui m'ont permis d'aller toucher un public, parce que quand c'est des univers qui restent quand même assez proches. Et ce que j'aime en tout cas dans la première partie, c'est que personne ne vous attend. Et alors tu as tout à aller chercher. Cloé : C'est ça, c'est ça. Oete : Je pense que c'est plus juste en fait pour un artiste de pouvoir faire ça. Cloé : T'as a carte blanche entre guillemets. C'est stressant parce que forcément le public ne vient pas pour toi au départ, mais il y a tout à faire. Oete : Mais justement, il y a un truc de pression que ça m'enlève. De me dire que les gens ne viennent pas pour moi, c'est que bon ben, ou alors ils seront surpris, ils seront trop contents, ou alors il ne se passera rien. Mais en tout cas, il n'y aura pas de déception entre les deux. Cloé : Oui, oui. Je vois très bien ça. Et là aujourd'hui, tu as une grosse tournée de prévue, pour le coup, une tournée nationale. Comment tu l'appréhendes maintenant que t'as sorti un album ? Oete : Ça fait un peu plus peur. Non, ça fait un peu plus peur parce que c'est génial de pouvoir jouer quand c'est complet. Cloé : T'es en tête d'affiche entre guillemets. Oete : Voilà, et donc ça me fait un peu plus peur d'arriver dans certaines villes et de me dire, oh mince, cette salle est vide. Mais non, je pense que ça va très bien se passer. On a d'autres outils pour justement que les concerts soient remplis, c'est génial. Ouais, c'est ça, voilà. Cloé : Puis ce qui est bien, c'est que tu as quand même une belle visibilité dans la presse aussi. Tu travailles aujourd'hui avec Patricia Teglia, qui est quand même l'attachée de presse d'Angèle, Terre Noire, etc. Comment la connexion s'est faite du coup ? Est-ce que c'était via Auguri ? Parce qu'il y a pas mal d'artistes en commun entre les deux ? Oete : Ça aurait pu être via Auguri. Mais non, ça s'est fait, on a contacté mon label, on a contacté Patricia en présentant mon projet. Cloé : Ton label qui est ? Oete : Roy Music, qui est un label indépendant du coup. Et puis moi, on s'était rencontrés, il y avait bien un café, moi je ne savais rien de tout ça. Et puis Patricia, elle est venue nous voir à Bourges. Et puis en sortant de Bourges elle s'est présentée à moi. Et elle m'a dit, nous allons travailler ensemble, jeune homme, et j'ai souri. Cloé : C'est beau ! Et justement, évidemment les artistes qu'on a eus sur le podcast ont eu des retombées de presse diverses et variées. Toi, pour le coup, t'as quand même des retombées de presse de très grande ampleur grâce à la sortie de ton album "Armes et paillettes", qui est un titre que j'adore au passage. Le titre en soi, c'est un univers à part entière. Donc vraiment, j'adore. Et comment, est-ce que tu saurais analyser aujourd'hui l'impact de ces retombées presse, justement, notamment des passages télé, radio que tu as pu avoir ? Oete : Je crois que c'est, je ne sais pas comment mesurer cet impact parce que je n'ai pas l'impression de le ressentir vraiment. C'est pas des choses qui sont palpables, en fait. Par exemple, je fais un concert, je vends des vinyles à la fin, je peux me dire, ok, sur le temps de personnes qui sont venues à un concert, j'ai vendu tant de vinyles. C'est quand même beaucoup. C'est numérique, c'est beaucoup plus calculable. C'est vrai que quand tu me fais des passages télé, je pense à M6, par exemple, ce n'est pas des choses qui sont mesurables, mais d'un côté, je le vois d'une autre manière où je reçois des messages encore aujourd'hui ou hier en me demandant si c'était moi la première partie de Juliette Armanet dans telle date, dans telle salle. Et du coup, c'est plus ce contact-là qui me le font réaliser et qui me font très plaisir, quoi. De vous, le soutien des gens directement qui m'envoient des messages. Enfin, je sais que j'ai publié il y a quelques jours une story parce qu'il y a une grosse omerta – enfin pas une omerta, mais il y a un sujet qui peut même dérange beaucoup dans la musique actuellement, qui est le fait d'être un homme homosexuel. Et du coup, qu'on soit Oete ou Pierre Demaere ou Thx4Crying, par exemple, où je pense même à d'autres artistes... Le fait est que pour certains dans l'industrie, on fait exactement la même musique alors qu'on a des projets totalement différents. Et juste parce que nous sommes des hommes homosexuels, alors nous faisons la même chose. Et après avoir posté cette story, j'ai eu énormément de soutien, et là je me suis dit, ok, enfin, de gens que je ne connaissais pas du tout. Et du coup, je me suis dit, ok, là pour moi, la promo a un impact. Cloé : Oui, parce qu'en général, enfin, en tant que, en tant que professionnels, en tout cas, on se dit toujours, ben, s'il y a des passages télé, des passages radios, ça peut convertir aussi en stream, par exemple. Oete : C'est vrai qu'il y a aussi ça. Enfin, je pense à le titre le plus streamé que j'ai, que c'est La Tête Pleine. C'est un titre qui n'a pas forcément été très longtemps, pourtant, en playlist et compagnie. Ce qui n'explique pas qu'il y a 400 000 streams aujourd'hui, je crois. Mais c'est vrai que, du coup, c'est le titre qui a ce plus streamé de tous les temps. Encore aujourd'hui, c'est, comment dire, si je regarde mes analyses. Oui, c'est celui qui streamait plus souvent aujourd'hui. Aujourd'hui, enfin j'ai regardé il y a deux semaines, c'est celui qui streamait le plus souvent. Cloé : Je pense que quand les gens te découvrent, c'est le premier qu'ils écoutent, s'il apparaît en premier aussi. Donc, il y a une espèce de cercle vertueux qui se... Peut-être que ça se convertit comme ça aussi. Oete : Après j'évite de regarder les chiffres, toutes ces choses-là, parce que je trouve ça toujours très ostracisant. Cloé : Oui, puis tout ne se résume pas aux chiffres, bien sûr. Oete : Non, non. Et puis, si on peut juste garder sa tête à créer, c'est important. Cloé : Exactement. Et puis, bon, c'est ton métier premier que de créer, donc c'est complètement normal. Et comme là, la plupart de tes actualités sont liées justement à la sortie de "Armes et Paillettes", et maintenant à sa réédition. Aujourd'hui, en tout cas, dans l'industrie musicale, et je pense que toi aussi, t'as entendu ce discours de il faut sortir des singles, il faut faire du titre par titre, il faut faire jouer l'algorithme, entre guillemets. L'album perd de plus en plus sa place. Et pourtant je pense que la scène pop française et variété française résistent un petit peu à ça. Est-ce que tu penses que l'album, il a encore sa place, en tout cas ? Oete : L'album a totalement sa place. Moi, j'aime le single et je consomme la musique au single, je le vois. Quand je suis dans le métro, je prends mon téléphone, vraiment, je ne vais écouter qu'un single. Je fais des playlist avec des singles, au final. Mais j'aime pouvoir mettre un vinyle, écouter un album en entier, je ne sais pas, en faisant un million de choses, en lisant, enfin, et avoir un album, c'est proposer un univers, au final. C'est aller aboutir encore plus loin qu'un simple au single, puis c'est aller aboutir une direction artistique autant dans le son que dans le visuel, que dans la réflexion de l'affaire. Et pour moi, l'album a totalement sa place. Je ne suis pas sûre que, je n'espère pas, en tout cas, qu'il va disparaître. Cloé : Moi, j'espère pas non plus. J'écoute énormément d'albums encore, donc évidemment, je ne espère pas. C'est vrai qu'avec les nouveaux... Oete : Quand on pense à TikTok, par exemple, que maintenant, on voit qu'il y a des chansons qui ne durent même pas une minute, genre 50 secondes, bon, c'est assez triste en soit. Mais il y a un contre-pied qui est hyper intéressant, je me faisais la réflexion il y a quelques jours, c'est que si on regarde tous les films au cinéma en 2022, pratiquement tous faisaient plus de deux heures. Et à l'heure où, enfin en tout cas, moi, tous les films que j'ai vus... Si tu regardes Babylon, Avatar, qui dure... Cloé : Trois heures et quelques, pour le coup. Oete : Ouais. Enfin, Tar, même, qui est sorti, incroyable, qui dure deux heures seize. On a vraiment un contre-pied qui est que la concentration humaine se réduit de plus en plus et pourtant, peut-être pour combattre ça, on va proposer des formats de plus en plus longs. Donc, je me dis qu'on peut prendre le contre-pied de ce truc et pousser, quoi. Je pense aussi. Mais en tout cas, au niveau pro, je sais que, je suis journaliste, mais je suis aussi consultante à côté pour des artistes et pour des labels, parfois. Je sais qu'avec un album, en général, on peut aller toucher plus aussi de partenaires professionnels, type des médias, par exemple. Très difficile aujourd'hui de défendre un EP auprès, par exemple, de la presse papier ou de la télé, etc. Donc, ouais, je pense que l'album, il a quand même... Moi, en tout cas, j'estime qu'il a encore sa place. Cloé : Il a sa place et puis c'est aussi l'aboutissement, l'album. Enfin, généralement, quand un artiste sort son premier album... Oete : Enfin, moi, c'était quelque chose de très sacré pour moi, l'album. Au début, j'avais très peur quand on m'a dit que je vais faire un album parce que dans ma tête, j'avais prévu de faire un EP. Cloé : T'as été conseillé par ton label pour ça ? Oete : Oui, tout le monde d'équipe, ça a été une décision assez collective, que ce soit du tourneur, du label, des attachés de presse. Et bon, au final, c'est un petit album parce qu'il a 10 titres. Mais c'est un album, voilà. Cloé : Et comment ça s'est fait le choix de la réédition d'un album ? Parce qu'en général, c'est une stratégie qu'on voit surtout chez les majors, tu vois. Je pense notamment à Angèle qui a réédité son album et qui a fait perdurer du coup son album. Mais dans le milieu indé, on le fait moins. Oete : C'était un choix et c'est un choix qui découle d'une contrainte en réalité. Aujourd'hui, pour produire un vinyle, il y a 6 mois d'attente parce que sur le marché, on a des personnes qu'on adore, comme Adele, comme Beyoncé ou Miley Cyrus, qui prennent une grosse partie des matières premières en fait des vinyles. Et ce qui a une répercussion directe chez les indépendants sur le temps d'attente de création. Et en fait, on ne pouvait pas proposer de sortie physique le jour où on avait prévu de proposer la sortie. Cloé : Ah ouais, d'accord, ok. Oete : La sortie digitale s'est faite le 31 octobre et la sortie physique du coup se fait le 7 février. Et pour marquer ça, on avait envie de proposer aussi un titre supplémentaire et de pouvoir avoir un dit titre. Mais je suis très toquée, en plus j'aime pas les chiffres impaires, donc le nombre 9 me faisait peur. 10, ça me va. Cloé : Ok, ouais. Et puis c'est vrai que 10, on se dit c'est un album. Oete : Ouais, ouais. Cloé : La frontière parfois entre album et EP, elle est assez fine. Je vois, il y a des gens qui sortent parfois des EP de 9 titres. On est vraiment à la frontière entre un EP et l'album. Oete : Il y a une nouvelle tendance, peut-être qu'on désacralise le fait que ce soit un album, on appelle ça des mixtapes. Cloé : Oui aussi, souvent quand c'est des produits purement digitaux aussi. C'est ce qu'on dit. Mais oui, la frontière entre tous les formats commence à complètement se brouiller, effectivement. Il y a une question que j'aime bien poser en fin de podcast. Parce que ce podcast a quand même une visée assez pédagogique, qui est du coup de présenter l'envers du décor de l'industrie indé, en tout cas, de la musique. Et je sais qu'il y a pas mal d'artistes et de pros qui accompagnent des artistes qui écoutent ce podcast. Est-ce que tu aurais un conseil à donner à des artistes, pas forcément nécessairement de pop ou de variété, mais tu vois, des artistes au global, qui voudraient se lancer demain en tant qu'artistes ? Oete : Je crois qu'il faut juste y croire, tout le temps. C'est hyper con hein. Cloé : Non, c'est pas... Oete : Moi j'étais éducateur spécialisé avant à Beauvais, en Picardie. Je me souviens très bien, c'était en mai 2020. J'étais réquisitionné pour être dans la réserve sanitaire et sociale parce qu'on était en pleine crise du Covid. Bref, c'était une horreur. Et en fait, je parle avec un ami qui est danseur et il me dit, écoute, en fait, tu peux pas rester dans cette ville à Beauvais. Il faut que tu montes à Paris. Et la différence entre rêver quelque chose et le mettre de manière très concrète, elle est toute simple, ça s'appelle une date. Donc tu te fixes une date et tu te dis, OK, à cette date-là, il faut que les choses soient comme ça. Et du coup, je me suis dit, OK, tu prends 15 jours et en 15 jours, tu montes à Paris, tu trouves un taf, un appartement. Donc on était genre le 15 mai, j'avais jusqu'au 30 pour faire ça. Et je crois le 27, je déménageais à Paris. J'avais trouvé un travail en appart et puis après, au bout de six mois, j'ai arrêté parce que même pas six mois, trois mois, parce que je me suis bien rendu compte que j'avais pas envie de faire ça, mais que je voulais faire de la musique. Et puis, j'avais le droit à six mois de Pôle emploi, je crois. Pôle emploi est très utile dans ce genre de cas. Vraiment, il n'y a pas de honte. De toute façon, moi, je suis intermittent aujourd'hui. Mais il n'y a pas de honte à se dire que le début de mon projet artistique va commencer par Pôle emploi. Cloé : C'est le cas de beaucoup d'entrepreneurs aussi. On démarre sur une période sur une fin de contrat ou des choses comme ça. Et c'est souvent le chômage ou d'autres aides, en tout cas, que pas mal de projets démarrent. Donc oui, c'est bien de le rappeler. Oete : Mais du coup, j'avais six mois de Pôle emploi. Je me suis dit, OK, j'ai six mois. Donc on est en septembre, avant février, il faut que j'ai trouvé un label et que j'ai signé et que je sois professionnelle et que ma mère soit rassurée et qu'elle ne me le dise pas. "T'as continué de chercher des annonces pour être éducateur?" Et voilà comment ça s'est fait. J'ai produit un son et le lendemain, je signe en label, très concrètement. Je sorti le son, le lendemain, je signe en label. Et oui, juste y croire. Et il y a des moments où, je sais pas, c'est comme des alignements d'étoiles, en fait, ou des alignements de planètes et tout s'aligne et tout roule. Et surfez juste là-dessus. Y croire Et puis ça n'ira pas. Puisqu'il y a toujours des fois où ça ne va pas. Mais il ne faut pas s'inquiéter, c'est pour tout le monde. Qu'on soit, je pense, Juliette Armanet ou n'importe qui. Même Madonna, mon avis, il y a des jours, ça ne va pas. Cloé : Oui, bien sûr, clairement. Mais c'est pareil, c'est bien de le raconter. Oete : Continuez d'y croire parce que c'est hyper intéressant. Voilà. Et moi, je suis quelqu'un d'hyper exotérique, j'ai besoin de matérialiser ces choses-là Donc je brûlais beaucoup de bougies bleues foncées qui renforcent la concrétisation des projets. Ou de bougies orange qui renforcent la chance ou des choses comme ça. Je demandais des choses à l'univers, ce qui peut paraître con. Mais je pense que verbaliser, par exemple, "mon goal, c'est de pouvoir faire un Olympia dans ma vie." Verbaliser, ça concrétise la chose. Verbaliser les choses, croyez-y. Faites très attention à vos rencontres parce qu'il y a aussi des gens qui ne vous veulent pas du bien dans ce milieu. Enfin, pas qui ne vous veulent pas du bien, mais qui veulent leur intérêt. Et quand on signe à des endroits, on sait très bien que l'intérêt du label, c'est de se faire de la thune sur votre projet. Dans l'industrie musicale, il y a le mot industrie. Vous restez des produits marketing. Moi, je ne supporte pas le fait qu'on puisse me dire que je suis un produit en attendant le profit. Il y a des choses comme ça qui sont hyper dures à entendre parce qu'elles sont totalement déshumanisantes. Nous, on est juste là avec nos rêves de gosses d'enfants de 7 ans de se dire que faire de la musique, c'est trop beau. Et voilà, y croire. Cloé : Et quand même, petite question supplémentaire. Déjà, juste avant, pour rebondir sur ce que tu dis par rapport aux gens qui pensent à leurs intérêts économiques. Ce que je dis souvent aux artistes et aux labels que j'accompagne, c'est qu'il n'y a jamais de mauvaise rencontre, il n'y a jamais de mauvaise connexion avec des gens. Par contre, quand il s'agit d'opportunités, il faut vraiment peser le pour et le contre et ne pas avoir peur de dire non à une opportunité si on ne le sent pas. Oete : Mais bien sûr. C'est vrai qu'il n'y a jamais de mauvaise rencontre. Enfin, comment dire ? C'est des débuts de parcours, au final. Peut-être des personnes avec qui on va bosser pendant deux ans et après on va arrêter parce que ça se passe mal. Cloé : Oui, voilà. Oete : Mais ce parcours de deux ans aura été magnifique pour les deux parties et merci d'avoir fait, tu vois. Cloé : Oui, c'est ça. Mais est-ce que tu as été conseillée quand même par... soit des personnes du milieu, soit... Oete : Non, j'ai toujours fait confiance à mon instinct. Non, mais enfin, la question... Mais c'est vrai que non, aujourd'hui, je m'entoure énormément et je demande des conseils et je demande... En fait, je me suis rendue compte à quel point on ne pouvait pas décider seul des choses parfois et que l'instinct, c'était bien beau, mais ça ne faisait pas tout. Donc, je sollicite beaucoup et je suis très content de pouvoir être accompagné par des idéologues, je les appelle, voilà. Cloé : Bon, en tout cas, je pense que l'ampleur de ta tournée nationale et tout ce qui se passe autour de ton album, enfin, ça prouve clairement que tu es sur la bonne voie, à mon avis. Tout se passera bien pour toi, c'est quasiment sûr. Donc, merci beaucoup pour ton temps et pour ton retour d'expérience. Ça fait très plaisir de pouvoir aussi avoir ce genre de retour, notamment sur les relations presse, parce que c'est rare à un stade aussi émergent, entre guillemets, parce que ça fait "que" deux ans. Je mets des guillemets volontairement pour ceux qui nous écoutent, vous ne les voyez pas, mais je mets volontairement des guillemets parce que c'est rare d'avoir des démarrages aussi aussi forts comme ça. Oete : Oui, mais d'un côté, c'est extraordinaire. Vous avez un petit article dans Libération, le jour de la sortie de votre album, je ne vais pas le cacher, mais d'un côté, ça fout une certaine pression aussi, des fois. Ça concrétise quand même tout l'effort. Non, mais c'est vrai, je me rappelle des MMS que ma maman voit par message ou elle est là avec son petit article à côté de ses fêtes et qu'elle semble fière. En fait, c'est l'autre version où c'est très drôle, et même par rapport à la télé, j'ai l'impression qu'à partir du moment où vous passez à la télé, le regard change. Je sais que là, mon repas de Noël a été une interview de trois heures avec toute ma famille que je n'avais pas vu depuis des années. Et en fait, c'est un truc qui convertit. Cloé : Oui, mais j'avais eu un retour similaire de Thérèse qui disait, dès que j'ai fait des couvertures de magazine, tout le monde pensait que j'étais une star d'un coup, alors que je reste une artiste émergente et que je galère toujours, pour reprendre ses termes. Oete : Je rejoins Thérèse et ce qu'elle dit. Cloé : Voilà, comme quoi. Mais en tout cas, merci beaucoup pour ton retour d'expérience. Merci. Voilà, vu l'ampleur de ta tournée, je ne me fais aucun souci pour toi, clairement. Et j'invite tout le monde à regarder si comment tu passes dans une ville près d'eux. Il y a plein là, 15 dates de tournée, puis après on est à les festivals. On a déjà 15 dates de festivals. Oui, bon, ça va bien se passer quoi. Bon voilà, en tout cas, quant à vous qui nous écoutez, merci beaucoup de nous avoir suivis. On se retrouve dans deux semaines pour un nouvel épisode de Parcours d'Indés. 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