Cloé : Bonjour à toutes et à tous, on se retrouve aujourd'hui pour le premier épisode de Parcours d'Indés, le podcast d'hauméa Magazine, le magazine 100% industrie musicale indépendante qui défend les parcours d'artistes et de professionnels qui oeuvrent aux renouveaux de cette industrie. Dans ce podcast, on met en avant chaque semaine un profil d'artiste ou de pro qui s'est lancé-e dans la voie de l'indépendance pour mener à bien sa carrière, et pour essayer de comprendre sa démarche, les difficultés rencontrées sur le chemin et les conseils qu'il ou elle aurait à donner à d'autres artistes et pro qui voudraient se lancer dans l'aventure. Aujourd'hui, on est au FGO Barbara avec une artiste qui fait sensation depuis 2020 dans la sphère musicale française, une artiste qui n'est autre que Thérèse. Bonjour Thérèse. Thérèse : Salut Cloé. Cloé : On se voit aujourd'hui dans le cadre des JIRAFE, un événement organisé par le Réseau des Musiques Actuelles de Paris qui fait figure de proue dans les événements pro de l'industrie musicale puisque chaque année, depuis 12 ans, divers intervenants et intervenantes se retrouvent autour de conférences, ateliers, tables rondes pour aborder des sujets qui permettent aux artistes comme aux pro d'en apprendre plus sur les rouages de cette industrie. Cette année, deux journées sont consacrées à la responsabilité sociale des organisations, ce qui comprend entre autres le côté durable des pratiques culturelles au niveau écologique et social. Et deux autres journées sont consacrées à la formation des artistes autour des thèmes du digital, mais aussi du réseautage, des démarches administratives, en bref tout ce qui concerne les artistes entrepreneurs et entrepreneuses qui veulent maîtriser l'industrie musicale. Et c'est pour ça qu'on voulait t'avoir aujourd'hui avec nous Thérèse sur ce podcast car tu es intervenu le 15 septembre dans le cadre d'un atelier sur les droits d'auteur et droits voisins, notion indispensable en plus pour tout artiste, mais aussi parce que tu es toi-même indépendante et ce depuis tes débuts. Est-ce que tu peux nous en dire un peu plus sur ce qui t'a poussé vers l'indépendance artistique ? Thérèse : C'était pas conscient déjà surtout. J'y comprenais rien. Je ne savais pas tellement ce que ça voulait dire qu'être indépendante, est-ce que ça voulait dire être seule, est-ce que ça voulait dire avoir un label, un tourneur, je mélangeais tout, les éditeurs et machin et tout et puis petit à petit j'ai compris un peu mieux comment ça se passait et il s'avère que moi je fonctionne beaucoup à l'instinct et j'ai commencé, d'ailleurs la Girafe, c'est le premier événement professionnel que j'ai fait de toute ma vie et c'est là que j'ai rencontré Alex Monville, qui n'est autre que le fondateur de La Couveuse, qui est donc mon label avec lequel je suis signée en contrat d'artiste indépendant et c'est vrai que souvent on entend par indépendant le fait d'être tout seul, enfin je pense que les gens ont un peu de mal à… Cloé : Beaucoup d'artistes pensent ça effectivement. Et en réalité non, c'est juste que tu choisis, enfin tu peux effectivement monter ta structure autrement. Thérèse : Oui, y'en a qui le font. C'est rare en réalité. Cloé : C'est rare, c'est assez rare. Thérèse : Y'a énormément d'artistes qui commencent maintenant à monter leur label, leur structure d'édition etc. mais en général c'est plutôt des artistes qui vont chercher des partenaires qui sont dits indépendants, ce qui veut dire en fait qu'ils n'appartiennent pas aux trois grands majors qui trustent, alors je sais pas du tout si mes chiffres sont exacts mais je dirais peut-être autour de peut-être 80% du marché. Cloé : J'ai pas les chiffres non plus, ce serait intéressant de les avoir mais en tout cas pour ceux qui nous écoutent et qui savent pas, les trois majors c'est Universal, Warner et Sony, en tout cas en France après pour le reste du monde ça se découpe parfois différemment. Thérèse : Exactement et en fait à l'intérieur de ces trois majors, ce que les gens savent pas non plus c'est qu'il y a plein de sous-labels qui appartiennent aussi à ces grosses maisons, c'est comme, je dis n'importe quoi, désolé de citer des marques comme ça mais c'est comme Lancôme qui appartient à l'Oréal, donc en fait t'as plein de sous-marques dans les grosses marques et en fait tu as parfois l'impression que des artistes sont dans des petits labels alors qu'en fait ils sont dans une sous-marque d'un énorme label. Cloé : C'est ça et il y a de plus en plus de subtilités d'ailleurs parce que parfois t'as des labels indés qui vont être distribués donc diffusés sur les plateformes et dans les bacs comme on disait à l'époque par justement des majors, donc il y a des subtilités, il y a des nuances qui se créent en plus et ça rend du coup les choses encore plus difficiles à naviguer pour les artistes, d'où aussi l'envie de faire ce podcast pour expliquer un peu mieux comment les choses fonctionnent. Toi tu évoquais du coup que tu es en contrat d'artiste indépendant avec un label qui s'appelle La Couveuse, tu peux expliquer rapidement les subtilités de ça parce que les contrats c'est quelque chose aussi qui est vite très délicat! Thérèse : Alors en fait je vais vous expliquer un peu comment je suis structurée, donc j'ai le label avec lequel je suis signée en contrat d'artiste qui s'appelle La Couveuse, qui est un label indé, je suis signée aussi avec Chancy Publishing qui est une maison d'édition indépendante, je suis signée à date aujourd'hui avec le label X-Ray qui est un label en licence donc qui va compléter le travail du label en contrat d'artiste et qui est aussi co-éditeur. C'est tout un puzzle à trouver, à créer soi-même. Je travaille avec Wart qui est un booker indépendant et je travaille aussi avec des attaché-e-s de presse qui s'appellent Ephélide, c'est aussi une maison indépendante. Donc tout cet écosystème là qui gravite autour du projet, ce sont des gens que j'ai rencontrés et en fait, quelque part pour répondre à ta première question, je les ai rencontrés, j'ai rencontrés plein plein de gens. Je n'ai pas fait exprès de travailler avec des personnes indépendantes, c'est juste que je me suis bien entendu avec ces personnes là et comme je te le disais un peu plus tôt, comme je travaille beaucoup à l'instinct et que je choisis mes partenaires à l'instinct, la vie a fait que c'était que des indépendant-e-s. À travers cette expérience là, j'ai quand même compris plein de choses par rapport à l'indépendance versus les majors. C'est qu'on n'a peut-être pas la même vision de l'industrie, on n'y recherche pas nécessairement la même chose. Il n'y a pas de jugement de valeur, il faut juste savoir où se positionner. Grosso modo, le label en contrat d'artiste, par rapport à mon projet, c'est un producteur au sens où il produit financièrement le disque, c'est tout. C'est-à-dire qu'il trouve les subventions, ou il avance ses fonds propres, pour que je puisse aller en studio enregistrer mes chansons et ensuite payer la personne qui va faire les prods, la réalisation, le mix, le mastering, jusqu'à la gravure sur le CD. Cloé : C'est ça le rôle d'un producteur en réalité, c'est même dans la loi si on prend la loi pour exemple, c'est celui qui finance en réalité. C'est ça être producteur, c'est pour ça que beaucoup d'artistes indés sont aujourd'hui leurs propres producteurs ou leurs propres productrices et c'est à distinguer du contrat de licence. De toute façon, ça c'est des choses qu'on reverra dans les deux podcasts suivants parce qu'on interviendra quelqu'un qui a monté un label et quelqu'un qui a monté une société d'édition. Et qui expliquera ça bien mieux que moi. C'est pour ça qu'on va pas s'étaler dessus aujourd'hui mais c'est important quand même de revenir dessus. Thérèse : C'est vrai que la subtilité entre le contrat d'artiste et le contrat de licence, c'est à quel point l'artiste délègue aussi cette notion de financement. Cloé : Exactement. En contrat de licence, c'est l'artiste qui prend tout à sa charge au niveau de l'artistique et qui délègue la partie normalement, en tout cas communication, distribution. Thérèse : Exactement. Et en fait, le contrat de licence avec X-Ray, X-Ray va s'occuper effectivement du reste, c'est-à-dire de la distribution, avec Alter K Distribution, c'est avec eux qu'on bosse. Qui est un distributeur indépendant. Jusqu'au bout, je vous jure, je ne le fais pas exprès. Et en fait, ils s'occupent effectivement de m'aider à piloter tout le marketing et la communication. Donc c'est eux qui amènent le budget pour que je puisse, je ne sais pas, moi, produire des clips, faire des photos de presse, travailler avec Ephélide justement, les RP. Et en fait, en plus de X-Ray, alors tout le monde n'est pas structuré comme ça, mais moi, Chancy Publishing investit aussi. Donc en fait, c'est pour ça qu'ils se partagent les éditions. C'est parce que Chancy investit aussi dans les mêmes outils. Et donc, voilà, donc du coup, forcément, ils partagent les éditions derrière. Et ça, c'est un micmac qui est propre à mon projet. Ce n'est pas du tout quelque chose d'obligatoire. En fait, l'avantage, quelque part, quand tu es indépendant, et même peu importe ton projet, mais c'est plus facile avec des indés, c'est de pouvoir créer ta tambouille. Mais ça met du temps. Cloé : C'est vrai qu'il y en a qui ont des structures qui sont beaucoup plus simples en termes d'organisation, qui ont leur asso ou leur société et qui délèguent parfois en licence à un label plus gros pour avoir une plus grosse force de frappe ou pour travailler avec un roster d'artistes différents. Et toi, pour le coup, tu as beaucoup plus d'acteur-ice-s autour de toi. Et du coup, qu'est-ce qui était, puisque c'est difficile en réalité de comprendre en plus tout ça, ce que fait un booker, ce que fait un éditeur, etc. Je parle au masculin, mais c'est pas volontaire. Voilà, juste, je tiens à le préciser. La voix de l'indépendance attire de plus en plus d'artistes en réalité. C'est très en vogue, et notamment le rap et les musiques urbaines ont vachement popularisé ça. Lomepal l'a popularisé, PNL l'a popularisé aussi. Et pour cause, c'est devenu possible de s'autoproduire, notamment au niveau production musicale pure. Pourtant, le rôle du label reste important quand même aujourd'hui. Qu'est-ce que tu considères de plus difficile aujourd'hui dans le métier d'artiste entrepreneur ? Thérèse : La réponse est tellement immédiate pour moi, c'est vraiment trouver du temps pour créer. C'est vraiment le plus dur. Comme le travail est infini, on est tout le temps à cette espèce de FOMO (fear of missing out) professionnelle où on a toujours le sentiment de devoir aller chercher des opportunités ailleurs. Et du coup, d'être présents sur les événements, sur des concerts, de faire de la communication, sur les réseaux sociaux, etc. Et en fait, tout ce temps qu'on consacre à faire autre chose, c'est du temps qu'on ne consacre pas à faire de la musique. Et aujourd'hui, j'estime avoir la chance justement d'être suffisamment entourée pour pouvoir déléguer certaines parties des trucs, soit que j'aime pas faire, soit qui ne sont pas de mon expertise, soit juste qui me font gagner du temps, pour pouvoir me consacrer, mais ne serait-ce que deux fois par an, ce n'est pas énorme du tout, mais d'avoir des plages d'une semaine ou deux pour pouvoir aller créer. Parce qu'en fait, si je ne prends pas ce temps, malheureusement, dans mon quotidien, je suis très vite aspirée par toutes les urgences. Ah, mais il y a telle une interview qui tombe, c'est une trop bonne opportunité, il faut la prendre. Ah, là, on te propose de faire ton premier DJ set pour une marque, c'est de l'argent pour le projet, il faut le prendre, etc. Et puis je ne te parle même pas des aléas de la vie, de ta mère qui est malade, de je ne sais pas quoi d'autre, peu importe, tes amis qui ne vont pas bien ou que sais-je, tu vois, des ruptures amoureuses. Cloé : La santé, tout ce que tu veux. Thérèse : Exactement. Donc, du coup, tu es vite aspirée. Et voilà, mais je me rends compte aussi que c'est une discipline vraiment personnelle de prendre du temps pour créer. Parce que tu peux être entourée des meilleures personnes, des plus compétentes et tout, il y a quelque chose qui se passe dans la tête. Moi, je me suis rendue compte à quel point j'étais control freak et qu'il fallait que j'apprenne à lâcher. Parce qu'aujourd'hui, je suis entourée d'une équipe merveilleuse, mais même malgré ça, parfois, j'ai le sentiment d'être en mode overbookée, overstressée de tout, alors qu'en fait, il y a des gens autour de moi. Et je pense que c'est l'avantage, le plus et à la fois l'écueil des artistes indépendant-e-s qui ont eu l'habitude de faire, c'est qu'ils n'ont pas peur de se retrousser les manches et de mettre les mains dans le cambouis et de bosser jusqu'à deux heures du mat tous les soirs, ce qui n'est pas sain. Cloé : On en parlera peut-être dans un prochain épisode, quelque part. Ce serait intéressant d'en parler, en tout cas, c'est vrai. Thérèse : La santé mentale, c'est important. Mais à la fois de se dire, en fait, stop là. Ce métier doit rester un métier sur le long terme, ça doit rester quelque chose où on met beaucoup de travail et d'efforts, mais où on se préserve, et aussi apprendre à faire confiance. Et avant tout à soi-même, parce que se faire confiance à soi, ça permet de faire confiance aux autres. Parce qu'une fois que tu as bien donné ta vision, que tu as bien défini le truc, il n'y a pas de raison, les gens ne sont pas débiles, ils vont comprendre, et puis au pire, on ajuste, y a pas mort d'homme. Mais oui, c'est ça le plus dur, trouver du temps pour créer. Cloé : Non, c'est vrai. C'est ce que je dis souvent aux artistes avec qui je travaille, parce qu'en parallèle de hauméa, j'ai monté une agence de service aux artistes, qui s'appelle Proxima Centauri. Et c'est ce que je leur dis toujours, en fait, votre métier premier, c'est de créer. C'est de faire de la musique. Et oui, au début, vous aurez beaucoup de casquettes à endosser et à accumuler, mais petit à petit, il faut savoir trouver les opportunités en rencontrant des gens, en discutant avec des personnes sur Instagram, parce que les réseaux sociaux, en plus, ont quand même facilité beaucoup les choses. Mais petit à petit, il faut trouver les bons partenaires en temps voulu, bien sûr, sans rush, sans rien. Thérèse: Exactement, ça, je suis hyper d'accord. Cloé: Il faut faire en fonction de soi et il y a la vie pro et la vie perso. Déjà, quand on est salarié-e, c'est pas mon cas, je suis indépendante aussi, mais quand on est salarié-e, la vie perso, on prend du temps pour la développer. Exactement pareil en tant qu'indé. Exactement la même chose. Et c'est important de savoir le faire et c'est un apprentissage de tous les jours. Mais voilà, quand il y a une opportunité qui se présente, évidemment, il faut bien relire les contrats, mais ça paraît normal. Mais quand il y a des opportunités qui se présentent, il faut savoir les saisir. C'est hyper important. Et là, pour revenir sur ta dernière sortie, qui est un single nommé "Jealous", qui parle notamment de jalousie sociale, etc. Ce titre fait suite à un premier EP que tu as sorti pendant la période du Covid, en plus, qui s'appelait Rêvalité. Et maintenant, tu as l'occasion de défendre ton titre en live auprès d'un public beaucoup plus large. En quoi ça a changé ta vie d'artiste indé, d'adapter à une nouvelle façon finalement de promouvoir ta musique ? Thérèse : En fait, c'est assez bizarre ce que je vais dire, mais je pense que j'ai eu une espèce de chance inouïe l'année où le projet est sorti, parce qu'effectivement, c'est né pendant les confinements. Mais en fait, j'ai réussi à faire des concerts quand même, et je ne sais pas comment ça s'est goupillé, mais j'ai réussi à devenir intermittente pendant le Covid. Cloé : C'est vrai que cette période, elle est assez floue pour tout le monde, je pense. Thérèse : Je ne comprends pas quand ça s'est passé. Donc en fait, assez rapidement, étrangement, j'ai pu défendre le projet en live. Mais aujourd'hui, de pouvoir le faire dans des conditions différentes, c'est-à-dire debout et démasqué-e, c'est quand même vraiment autre chose. Cloé : Et dans des conditions de tournée, j'imagine, parce que tu as quand même pas mal enchaîné les concerts et festivals. Ça, pendant le Covid, tu n'as pas pu le faire. Thérèse : Non. En fait, j'ai eu de la chance parfois, entre des confinements, de faire des concerts, de faire quelques festoches qui étaient là. Cloé : Je me souviens, on s'était rencontrées dans le cas du Crossroads l'année dernière, donc oui. Thérèse : Et en fait, je trouve ça génial. Parce que je crois qu'à chaque fois que je fais un concert, ça me rappelle pourquoi je fais de la musique. Je te parle du moment quand je suis sur scène, évidemment, mais je te parle surtout de l'après. En fait, moi, ce que j'adore, je crois que je fais ce métier pour rencontrer des gens. Donc, ça m'arrive effectivement de toute façon à travers des réseaux sociaux. Et franchement, j'ai rencontré un nombre de gens incalculables depuis les confinements. Parce que j'ai noué, je me suis liée d'amitié vraiment, et j'ai noué des réelles amitiés avec des gens que je n'ai jamais vus, avec lesquels j'ai des discussions super profondes, qui suivent mon moral, ma vie au quotidien et vice versa quand c'est possible pour moi, parce que je ne peux pas le faire avec tout le monde. Mais c'est réel. Et là, le fait de pouvoir même... Il y a des gens que j'ai rencontrés après ces amitiés virtuelles que j'ai rencontrés en vrai. Si tu m'entends, je pense à Joffrey, je pense à Sacha, que je vais voir bientôt, qui me suit quotidiennement vraiment depuis un an. Et là, je vais à Saint-Malo et je vais la voir. Je pense à Nora, que j'ai rencontrée au Sioux, et qui est venue à Paris exprès pour une interview pour le journal de son école en première. Cloé : C'est trop mignon. Thérèse : Et en fait, ce que j'adore, c'est ça, c'est de descendre de scène et d'essayer de comprendre comment les gens ont reçu le message. Au-delà du gros son, etc. Cloé: Oui, oui, bien sûr. Thérèse : Des lumières, de mes slips à paillettes. Voilà, j'aime comprendre à travers les différents publics, que ce soit un public de festivals féministes, comment dire, antiracistes, jusqu'à un festival à rien à voir, de villages au fin fond de la France. Ils ont probablement très très peu vu d'asiats de leur vie, et donc tu arrives avec tout ton bagage, ton sac à dos de Dora l'Exploratrice, plein chargé de trucs qui sont urbains, qui sont très parisiens, et tu leur déverses ça à la tronche, comment ils l'ont pris, est-ce qu'ils comprennent, est-ce qu'ils comprennent pas. On en discute après, et ça je trouve que c'est un peu fou en fait. Je fais de la musique pour ça en fait, être une sorte de pont, et de faire tomber des stéréotypes des deux côtés, même du mien. Enfin tu vois, je trouve ça trop bien de pouvoir voir les gens en vrai, et je crois qu'en fait le projet Thérèse convertit, alors c'est un terme un peu commercial et marketing, mais convertit le plus en live, parce que je crois que ma musique nécessite, enfin elle peut s'écouter comme ça évidemment, mais je pense que quand elle est augmentée dans certains contextes, quand je peux expliquer les choses, le pourquoi, du comment, quand tu peux discuter avec ton public, entre les chansons, je pense qu'il y a une réelle valeur ajoutée, et que les gens en sortent plus proches, qu'on prête mieux ce qui se passe, c'est pas juste un beat, c'est pas juste des mélodies, etc. C'est ça, plus quelque chose de politique derrière, et du coup il y a une forme d'adhésion, ou de rejet d'ailleurs, qui peut se faire, mais en tout cas quelque chose qui tend vers moins d'indifférence, moins de neutralité, et je pense que c'est quelque chose qui me plaît. Cloé : C'est intéressant ce que tu dis, parce que c'est vrai qu'on conseille souvent aux artistes de vraiment se présenter au niveau digital, sur les réseaux sociaux, que ce soit dépendant des plateformes que les artistes occupent sur TikTok, sur Instagram, tout ça, et moi je te suis depuis plus d'un an maintenant, ça commence à faire, le temps passe vite, et du coup je te vois évoluer sur les réseaux sociaux, partager ton quotidien, tes résidences, l'enregistrement de tes EP, etc. T'es très active, notamment sur Instagram, t'as quand même une communauté de plus de 12 000 personnes aujourd'hui qui te suit, et t'es très réactive quand les gens répondent à tes stories, puis même t'organises des sondages, etc. Et donc c'est intéressant ce que tu dis par rapport au live, parce que tu sens une vraie différence entre la connexion que tu peux avoir avec des gens en ligne, et la connexion que tu peux avoir avec un public entier en live, parce que quand tu fais un concert, t'es face à une foule, une foule de personnes, de gens anonymes, tandis que quand tu postes des choses sur les réseaux sociaux, t'as des profils qui s'affichent dans tes commentaires, t'as des noms qui s'affichent dans tes DM. C'est quoi finalement la différence, et pourquoi c'est plus important, enfin en tout cas pourquoi c'est plus profond pour toi? Cloé : Alors je sais pas si c'est plus profond, ou plus important, je saurais pas dire, je pense que c'est très différent, mais qu'en live, on se permet, et je leur permet, de me voir dans ma globalité pendant une heure. Ce qui n'est pas le cas sur les réseaux sociaux, qu'on le veuille ou non, même si j'essaie d'être la plus authentique possible parce que je suis comme ça. Cloé : Et c'est bien que tu dises ce terme, parce que c'est vrai que c'est un terme qui revient beaucoup, l'authenticité, et qu'il faut de toute façon démocratiser, il faut que les artistes soient authentiques, il faut pas du tout se conformer à un moule, mais le fait qu'il y ait malgré tout un filtre sur les réseaux. Thérèse : Bah oui, tu dis ce que tu veux quand tu le veux, et il n'y a pas de place quelque part à l'accident. Moi je suis le genre peut-être de personne à laisser des conneries que je dis, ou à moins maîtriser, etc. Mais c'est toujours un peu maîtrisé, le moment que tu choisis pour faire ta story, etc, c'est quand tu te sens comme ci ou comme ça. Là quand tu es sur scène, en fait, tu es sur scène pendant une heure. Donc même si entre guillemets tu joues un personnage de scène, tu es là physiquement, c'est-à-dire que si ça te gratte le cul, tu te grattes le cul, tout le monde le voit. Si ça te... j'en sais rien. Si tu t'étouffes en chantant, tout le monde le voit. C'est du live en fait. T'es là, et en fait tu dois faire avec le présent, et avec les gens qui sont là, et qui te regardent, et que tu connais pas. Et je trouve que c'est... Qu'est-ce qu'il y a de plus vrai en fait que de se mettre en danger à ce point ? Cloé : Oui, parce que c'est vrai qu'une story, en plus tu peux la réenregistrer... Thérèse : Mille fois ! Tu peux te remaquiller si tu trouves que je sais pas quoi. Là, moi j'ai eu plein de... Je peux raconter mille anecdotes un peu con-cons qui m'arrivent sur scène. Le chat dans la gorge... Là ça n'a rien à voir avec le projet Thérèse, mais une fois quand j'étais étudiante, je suis montée sur scène après être sortie des toilettes, et en fait ma jupe, que j'avais mal remise, elle était dans mon collant. Et en fait tout le monde voyait mon cul, j'étais en string. Je suis montée sur scène comme ça. Comment tu rattrapes ça ? Cloé : C'est vrai que tu ne verras jamais ça sur Instagram. Thérèse : Jamais ! Aussi authentique que tu penses être. Ou alors c'est monté. Mais je veux dire, c'est créé pour susciter une réaction, mais là c'était pas du tout fait exprès. Et comment l'humanité, dans les deux sens, réagit aux choses ? Et je trouve que c'est ça, c'est l'inconnu, je pense, la non-maîtrise, la non-possibilité de maîtriser tout le monde à l'instant T. Si les gens se mettent à applaudir... Ça m'est arrivé par exemple à un concert où les gens ont applaudi super longtemps. Et genre, je ne savais plus où me mettre. Et tu sais, c'est cool, mais en fait t'es pas préparée non plus à... Je ne te parle pas que des catastrophes, je te parle aussi des trucs géniaux qui se passent. Des fois t'es trop émue. Je me souviens aussi en Corse, là je parlais d'un concert à Lorient, mais en Corse, c'était mon anniversaire. Ils se sont mis à chanter, sortir des briquets pour que je souffle dessus, c'était nimp. Juste avant, j'avais fait tomber l'ordinateur d'Adam parce que j'avais dansé. La musique s'arrête, tu fais quoi ? En fait, j'adore ces moments-là, la beauté de l'accident de la vie, le truc qui n'est pas prévu. Et ça, je crois que c'est quelque chose qui me touche énormément, et je pense que c'est pour ça aussi que je fais du live. Et en plus, le truc, c'est que... Alors, sur Instagram, tu peux aussi toucher plein de gens que tu ne connais pas, mais en général, Instagram est dicté par un algorithme, et donc les choses se font par affinité tout de même. Hashtag, tu suis des gens qui suivent des gens, qui suivent des gens, et donc quelque part, tu te retrouves un peu avec une espèce de consanguinité d'idées, plus ou moins. Cloé : Oui, il y a des affinités qui se... Thérèse : Tu vois ce que je veux dire ? Il y a des affinités, voilà. Donc c'est plus ou moins grand, et c'est plus ou moins grave d'ailleurs, parce que des fois, c'est trop bien d'être en safe place, et des fois, on tourne un peu en rond, je trouve. Mais l'avantage d'un concert et d'un festival, par exemple, c'est que le mec, justement, ou la meuf qui est venue voir Lomepal, elle va te voir. La personne qui est venue voir, j'en sais rien, Parcels, ou un rappeur, ou une autre chanteuse féministe, ou un groupe de rock qui n'a rien à voir, va aussi potentiellement tomber sur toi. Et du coup, je trouve que ça, c'est un peu magique. Ça crée des connexions un peu inattendues avec des communautés que tu ne toucherais pas forcément via Instagram, effectivement. Cloé : Exactement. Thérèse : Tu as quelque chose de peut-être... Bon alors, ok, c'est des gens qui aiment la musique. Cloé : Oui, bien sûr. Thérèse : Effectivement, tu ne vas pas chercher un mec à un concours d'échecs, ce qui n'empêche qu'il pourrait aussi aimer les échecs, je n'ai rien contre vous. Mais ce que je veux dire, c'est que voilà, le seul dénominateur commun sûr qu'il y a dans un festival, dans un concert, c'est que la personne aime la musique et est curieuse de ça, c'est tout. Et je trouve ça cool. Cloé : Effectivement. Thérèse : Et je trouve ça cool aussi de se confronter aux gens qui, peut-être, tu vas voir quelqu'un dans le public, je ne sais pas, qui ne bouge pas, qui se regarde bizarrement parce que... Et ça, c'est des choses qu'on voit en plus. Tu vois tout, en fait. On fait genre, on ne voit pas. On fait genre, on regarde la ligne d'horizon et tout. Tu ne vois peut-être pas tout le monde, mais je veux dire... Les 10 premiers rangs, tu les vois en vrai. Et tu vois des gens qui s'enjaillent et c'est trop bien. Et la plupart du temps, les gens sont plutôt cools en concert parce que les gens qui viennent en concert ont plutôt envie de s'amuser, sont dans un certain mood. Cloé : Bien sûr. Thérèse : Mais il y a des gens, et moi-même, ça m'arrive, d'arriver par hasard dans un concert parce que je m'y suis laissée traîner par des potes. Surtout en festival, même parfois, ça arrive très souvent. Exactement. Et en fait, d'être raide comme un piqué et de me dire, qu'est-ce que je fous là, tu vois. Et puis, il y a des fois, on a envie d'observer aussi, ça arrive. Oui, tout simplement. Cloé : Effectivement. Thérèse : Je ne sais pas, tu es fatiguée ou parce que tu es plus à l'intérieur de toi-même. Et ça, il faut dealer avec ça. Je trouve que c'est un très, très bon apprentissage, justement, de l'acceptation de l'image que tu renvoies. Alors, est-ce que la personne, elle ne bouge plus parce que c'est mieux ce que je fais ? Est-ce que je l'accepte ? Est-ce que ça me déstabilise quand je chante ou pas ? Et je trouve que c'est beaucoup plus fort quelque part que ce qui se passe sur les réseaux. Bon, des fois, tu as des haters, mais tu as le temps de crier chez toi, taper dans un coussin. Et le hater, si tu veux, tu le bloques. S'il ou elle est vraiment relou, tu bloques. Alors que s'il y a quelqu'un qui te crie ching-chong dans la salle alors que tu es en train de chanter, qu'est-ce que tu fais ? Moi, j'ai une copine, elle chantait dans un village, elle s'est reçue une poupée noire, alors qu'elle était en train de jouer, elle est noire. Je ne citerai pas son nom. Mais elle s'est reçue ça en jouant. Comment tu réagis ? La violence du truc. Cloé : C'est hyper violent. Thérèse : On pleurait de rire en en parlant, tellement c'est violent. Cloé : Le mécanisme de défense. Thérèse : Oui, bien sûr. J'ai des rire nerveux. Et comment tu le fais face à ça, en fait ? Qu'est-ce que tu dis ? Qu'est-ce que... Oui, ça, ça existe. Il y a de tout, en fait. Cloé : C'est bien de le rappeler. Aussi inconfortable que ce soit, c'est de l'un de le rappeler. Ça existe encore. Thérèse : Mais c'est les aléas de la vie. Et la chance qu'on a quand on est sur scène, c'est qu'il y a quand même une forme, même si tu peux te faire agresser ou recevoir beaucoup d'amour, etc. Il y a une forme de protection parce que t'es un peu plus isolé-e. Donc ça te permet aussi d'avoir cette distance, de respirer un bon coup et de te dire qu'est-ce que je fais ? Qu'est-ce que je dis ? Est-ce que je réponds ? Est-ce que je réponds pas ? Est-ce que je réponds après ? Est-ce que je réponds deux chansons plus tard avec une certaine répartie ? Est-ce que je réponds sur les réseaux sociaux plus tard ? T'as un certain choix que t'as peut-être un peu moins dans la vraie vie, peut-être. Tu vois, si le mec t'a craché dessus dans le métro, il est parti, il est parti. Cloé : C'est vrai. Thérèse : Donc malgré tout, t'as un petit peu de contrôle quand même. T'as une possibilité d'avoir une seconde chance dans un laps de temps d'une heure, on va dire. Et qu'est-ce que tu en fais ? Cloé : Oui. Thérèse : Après, ça, c'est une autre question. Cloé : C'est ça. Et dernière petite question pour terminer cet épisode. J'aime bien impliquer un petit peu les gens qui nous écoutent et terminer sur une note qui pourrait les impliquer un petit peu dans tout ça. Et là, je pense particulièrement aux artistes parce qu'on s'adresse... On adresse en tout cas le sujet de l'indépendance. Si tu devais donner un conseil aux artistes qui nous écoutent et qui souhaiteraient justement sauter le pas de l'indépendance ou en tout cas de l'émergence artistique, qui oseraient se lancer, qu'est-ce que tu leur conseillerais en premier lieu ? Thérèse : Franchement, apprendre à se connaître. Je crois qu'il n'y a aucun conseil plus cher que je pourrais moi donner à quelqu'un. Apprends à te connaître qui tu es. Apprends à te regarder honnêtement dans le miroir. Qu'est-ce qui est bon chez toi en termes de qualité par rapport au système, j'entends, parce que je ne suis pas quelqu'un qui dit le bien, c'est ça, le mal, c'est ça. Mais quelles sont tes qualités vis-à-vis de l'industrie ? Quels sont les éléments là où ça pêche ? Qu'est-ce que tu veux faire ? Est-ce que tu veux t'améliorer ? Est-ce que tu veux chercher des partenaires qui comblent ça ? Quel est ton objectif ? Quel est honnêtement ton idée de la réussite ? Qu'est-ce que ça veut dire ? Est-ce que ça veut dire payer ton loyer avec ta musique ? Est-ce que ça veut dire être dans des gros médias ? Est-ce que ça veut dire gagner beaucoup d'argent ? Qu'est-ce que ça veut dire vraiment de chercher ? Chercher qui tu es, comprendre ce que tu veux faire, en fait. Et de là, les réponses, elles vont venir. Après, le reste, entre guillemets, c'est que du travail. Et c'est vraiment pas le pire. Le plus dur, c'est de comprendre qui on est. Et savoir pourquoi on fait ça, en fait. Cloé : Exactement. Thérèse : Et parce qu'en fait, ça va éviter beaucoup de frustration. Ça va éviter, tu vas en parler de jalouse tout à l'heure, justement, ça va éviter tout ce truc de pourquoi il ou elle réussit. Oui, mais il ou elle, elle est en major. Est-ce que tu as envie d'aller en major ? Qu'est-ce que ça veut dire ? Qu'est-ce que ça implique d'aller en major ? Est-ce que ça correspond à ton caractère ? Moi, parfois, je me lève, j'ai le seum. Et je me dis, mais en fait, en major, je m'engueulerais tous les jours avec les gens qui m'entourent. Parce qu'en fait, moi, ce qui m'intéresse dans la vie, c'est faire ce que je veux. Et que les gens qui travaillent avec moi suivent ma vision. Et j'ai l'honnêteté de me le dire, de me dire, en fait, je pense savoir ce que je veux mener comme type de carrière. Et je peux me tromper, ça veut pas dire que je vais pas me planter, tu vois. Mais j'ai cette conviction qui est très, très forte au fond de moi. Et du coup, je me dis, quelque part, qui, entre guillemets, même ou surtout croit en ce projet, me suivent. Et qui a envie d'investir dans ce projet parce qu'il pense qu'il y a de l'avenir, me suivent. Et c'est ça, en fait. Et c'est pour ça que je suis indépendante. Mais j'ai d'autres copines qui sont en major. Et en fait, elles me disent, meuf, moi, ça fait 10 ans que je galère. J'en ai marre. Ça fait 10 ans que j'ai un taf à côté alimentaire. J'ai pas le time de plus rien, machin et tout. L'argent, ce n'est pas ce qui m'intéresse. Moi, ce que je veux, c'est qu'il y ait un maximum de gens écoutent ma musique. Et j'ai la conscience de faire de la musique totalement commerciale que je kiffe. Mais go, allez en major. Cloé : Bien sûr. Thérèse : Vous avez moins de tel âge. Alors, je dirais pas un âge en particulier, mais il faut avoir aussi conscience de sa condition par rapport au système. Ce qui ne veut pas dire qu'on est acquise. Ça veut dire simplement qu'on est conscient. Moi, j'ai 36 piges aujourd'hui, en vrai. Et ce n'est pas que je ne pourrais pas intéresser des majors, mais il faudrait que je pèse déjà. Si je pesais en termes de fric, eux, leur objectif, c'est de faire de l'argent. Il n'y a pas de problème. Ça aussi, il ne faut pas l'oublier. Cloé : Exactement. Thérèse : Leur objectif, c'est ça. Ils ne sont ni gentils ni méchants. Ils veulent faire de l'argent. Le business model n'est juste pas le même. C'est tout. Cloé : Exactement. Thérèse : Ce qui ne veut pas dire qu'ils sont contre défendre telle ou telle valeur, ça, je n'en mettrais pas mon bras à couper. Je dis juste que si telle ou telle valeur un jour fait beaucoup d'argent, ils iront. C'est tout. C'est pas la même chose. Cloé : Non, c'est juste pas le même business model. Thérèse : Exactement. Et limite, on pourrait presque faire un comparatif, parce que l'indépendance n'est évidemment pas pour tout le monde. Et de la même manière, les majors, ce n'est pas pour tout le monde. Cloé : Exactement. Et le parallèle va paraître tiré par les cheveux, mais en réalité, il ne l'est pas. C'est comme, soit t'es salarié-e , soit t'es entrepreneur-euse. C'est pareil, c'est soit tu vas en major, et du coup, tu es « salarié-e » de la major, tu produis du contenu pour eux et de la musique pour eux, ou alors, t'es indépendant-e, tu fais tout toi-même, tu montres ton équipe autour de toi de la même manière que tu embaucherais des gens, et tu choisis ton équipe. Et c'est ça aujourd'hui l'indépendance. Thérèse : Oui, carrément. Et c'est exactement ça. Et du coup, moi aujourd'hui, je suis personne pour dire il faut faire ci ou il faut faire ça. Dans ma position et dans mon projet, je défends ce que je fais moi, mais je n'ai aucun dogme et je me dis, mais vraiment, go, allez-y. Moi, j'ai vu plein de rappeurs signer des licences parce qu'ils avaient leur propre structure, avec des gros labels. Leur objectif, c'est de faire de la moula à court terme. Allez-y, prenez ce qu'il y a à apprendre. Il y a des gens, au contraire, ils ont voulu se sortir de ça. Moi, je le cite pas mal comme exemple et tout. Il fait ses bails, pas de problème. Comme un chef d'entreprise ou une chef d'entreprise, exactement pareil. Mais parce qu'il a les épaules, parce qu'il sait que s'il faut charbonner jusqu'à 4 heures du matin, il faut. Il le fait, moi pareil, et plein d'autres en ont des pareils. Après, je pense que le plus dur, c'est quand t'es frustré-e de vouloir quelque chose et de pas. Et là, il faut se poser les bonnes questions. Pourquoi ça pêche ? Est-ce que ma musique n'est pas suffisamment dans les codes des majors, alors que je veux aller en major ? Auquel cas, est-ce que tu es prêt à sacrifier ta musique ? Sinon, si ta priorité, c'est de faire exactement la musique que tu veux, dans ce cas-là, juste trouve de l'argent autrement. Cloé : Et aujourd'hui, l'industrie musicale, en plus, le permet ça, d'aller chercher des financements ailleurs. C'est d'autres sujets qu'on évoquera dans d'autres épisodes du podcast. Thérèse : Faites du NFT, faites j'en sais rien. Par exemple, il y a des subventions qui sont possibles, il y a des campagnes crowdfunding qui sont possibles. Parfois, justement, c'est ce qu'on évoquait, travailler avec un label qui va prendre à sa charge certaines dépenses de communication et de diffusion. Ça aussi, c'est une possibilité. Cloé : Et accepter que l'argent ne rentre pas tout de suite dans sa poche. Thérèse : Exactement. Cloé : Comme tout indé aujourd'hui. Thérèse : Exactement. Je suis en contrat d'artiste et en licence. Je vous jure que même si je suis en indé aujourd'hui, les recettes touchées, je touche peanuts. Mais c'est un choix. C'est-à-dire que je suis allée dedans, j'ai regardé tous les contrats. Mais moi, aujourd'hui, j'ai rien à sortir pour faire ma musique. C'est-à-dire qu'à côté, je suis styliste, je gagne ma vie, etc. Je suis intermittente en plus, parce que j'ai fait confiance à des gens qui me font travailler. Et aujourd'hui, franchement, ça me suffit. Je n'ai pas besoin de me dire j'ai besoin d'empocher toutes les recettes de mon label. Non, je suis très bien comme ça. Le jour où je me sentirai les épaules pour créer mon propre label parce que je veux empocher ces sous-là, je le ferai, c'est tout. Et j'en parlerai en toute transparence avec mes partenaires et on fera en fonction. Cloé : Et c'est une question de vision aussi pour toi à long terme, etc. Ça aussi, c'est un conseil que je donne de temps en temps, même si c'est difficile d'avoir une vision, par exemple, sur cinq ans. C'est quoi ton rêve, en fait ? Est-ce que c'est à terme de t'éloigner de la scène et de devenir directeur artistique et du coup de travailler pour d'autres artistes ? Est-ce que c'est de faire de la musique pour des films et pour des pubs ? Est-ce qu'au contraire, c'est de faire énormément de tournées et dans ces cas-là, te représenter sur scène vraiment au devant de la scène ? Voilà, c'est tout ça, en fait. Ça aussi, c'est des questions qu'il faut se poser. Thérèse : C'est ça, c'est vraiment apprendre à se connaître. Cloé : C'est le meilleur conseil, je pense, effectivement, qu'on peut donner. Merci beaucoup, Thérèse, pour ces conseils. Merci encore de nous avoir accordé ton temps pour cette discussion super enrichissante en plus. Thérèse : Avec plaisir. Cloé : Toujours un plaisir de toute façon de t'avoir avec nous. Et quant à vous qui nous écoutez, merci d'avoir suivi ce premier épisode. On espère vraiment que ça vous a plu. On se retrouve la semaine prochaine pour cette fois-ci évoquer les thématiques de l'autoproduction musicale avec Jean-Charles Dufeu, co-fondateur de Microcultures, que j'aurai le temps de présenter dans le prochain épisode. En attendant, vous pouvez nous suivre sur Instagram en tapant haumea.magazine sur l'application. 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